Un avenir français à littérature coréenne

Conférence prononcée le 16 février 2024 au Colloque L’Avenir de la littérature coréenne organisé par le Département de langue et littérature coréennes de l’Université nationale de Séoul BK21 Équipe de recherche sur l’enseignement de la langue et de la littérature coréennes en tant qu’expéditeur à l’ère trans, co-organisée par la Kubo Society et la Lee Sang Literature Society

Les dernières statistiques du Littérature Translation Institute (LTI) montre clairement un développement sans précédent de la littérature coréenne dans le monde, particulièrement au Japon et dans les pays anglo-saxons. En France, la tendance est identique, avec sans doute un bilan plus contrasté du point de vue des ventes. Mais aborder le développement de la littérature coréenne suppose que soit éclaircis un certain nombre de points, tout particulièrement les marqueurs de développement, ainsi que les critères qui permettent d’évaluer quand une littérature devient littérature mondiale. Le défi est énorme. Il est une question que nous ne pouvons contourner : qui légitime une littérature comme étant une littéraire, quels sont les critères de cette légitimation ?

Poser la question de la place de la littérature coréenne comme littérature mondiale, c’est inévitablement poser la question « qui décide de cette place » ? Quelles sont les instances qui valident l’entrée d’une littérature dans le concert des littératures mondiales ? Si nous admettons qu’un processus de légitimation est toujours extérieur au sujet à légitimer, il nous faut nous demander qui a le pouvoir de légitimer cette littérature, et dans ce cas, quels sont les critères de cette légitimation ? Comment en effet une littérature provenant d’une langue dominée peut-elle accéder au rang des littératures dominantes, ou tout au moins des littératures mondiales suivant la catégorisation traditionnelle qui en est faite ?

I-La littérature coréenne, une littérature dominée

Dans son ouvrage La langue mondiale, Traduction et domination[1], Pascale Casanova affirme qu’il est possible de lutter contre la langue dominante en adoptant la position de l’athée, qui est de ne pas croire au prestige de cette langue. Du Bellay pour la France, Herder pour l’Allemagne, Leopardi pour l’Italie, Khlebnikov pour la Russie, —pour prendre des exemples géographiquement proches et chronologiquement éloignés—, ont montré que la position d’une langue dominante était une position instable, bien qu’elle s’insinue dans toutes les autres langues (le konglish par exemple) mais que toutes les langues avaient la possibilité de leur affirmation esthétique. Car une langue ne domine jamais par son nombre de locuteurs (sinon le Français n’aurait jamais été langue dominante, au regard du nombre de locuteurs chinois ou russes, par exemple), mais par le prestige que lui accordent les locuteurs autant natifs qu’étrangers. Bourdieu indiquait que les langues sont socialement hiérarchisées selon leur proximité au pouvoir (aujourd’hui pouvoir mondial) et selon les profits symboliques qu’elles procurent. Une langue domine quand ses locuteurs croient à la hiérarchie des langues. La reconnaissance du pouvoir de domination d’une langue confère à cette langue un profit symbolique difficile à remettre en cause par les locuteurs comme par les institutions (le cas du chinois en Corée par exemple).

Certes, la position de la langue coréenne a évolué et la demande effectuée par les jeunes catégories d’apprendre le coréen explose littéralement. À titre d’exemple, dans notre université Aix-Marseille, nous recevons 2000 demandes d’étudiants alors que nous n’avons que 75 places. Mais cet engouement pour la langue coréenne et au-delà, la culture coréenne, est le fait majoritairement des jeunes, dont nous savons que cette catégorie de lecteurs diminue drastiquement depuis plusieurs années. Dans son enquête sur la lecture en 2023, le Centre national du Livre indique qu’un jeune (15-24 ans) sur 5 n’a jamais ouvert un livre ; 49 % des jeunes interrogés indiquent qu’ils lisent très occasionnellement un livre. Ainsi, les plus gros consommateurs de langue et culture coréennes sont aussi les plus faibles lecteurs.

Toutefois, une deuxième catégorie d’apprenants se fait jour, grâce aux écoles coréennes qui balisent le territoire français, ainsi qu’au Centre culturel coréen. Il s’agit d’un public d’adultes venant apprendre le coréen sur la base d’intérêts culturels ou touristiques. L’influence de la K-pop que l’on retrouve majoritairement chez les jeunes n’agit que très peu sur cette catégorie. Par chance, ce sont aussi les tranches d’âge qui lisent des livres. S’il n’est pas encore possible d’affirmer que le développement de la langue coréenne profite à la littérature coréenne, le vieillissement des catégories d’élèves pourrait à terme constituer un atout pour cette littérature.  

II-La situation de la littérature coréenne en France

La 1ère période de publication

En France trois principales périodes de publications coréennes ont eu lieu. La première vague date des années 1990, avec des auteurs comme Yi Munyol, Yi Cheong-jun, Park Wanso, Choe Yun, Kim Sung-ok, Choe Inhun, Cho Sehui… : ces auteurs publiés par la maison d’éditions Actes Sud, pionnière en la matière, a permis de découvrir une littérature coréenne puissante, d’une richesse mémorable, sous un angle qui nécessitait souvent une bonne connaissance de l’histoire de la Corée pour découvrir la portée réelle de ces œuvres. Bien entendu, toutes les littératures du monde en sont au même point, mais pour la littérature coréenne, c’est certainement plus sensible quand on sait combien le rapport entre littérature et histoire est étroit, dans le dernier siècle notamment. Nous lisions dans ces textes une Corée en souffrance, peinant à sortir d’un passé douloureux, en marche forcée vers l’industrialisation du pays et les dégâts consécutifs. Une littérature magnifique, faite pour une génération de lecteurs que les références historiques et l’intertextualité nécessaire ne rebutaient pas, des lecteurs soucieux d’élargir leurs connaissances pour mieux cerner les contours du texte. Bien qu’il n’existe pas d’enquêtes (à notre connaissance) sur cette période, il est possible de formuler l’hypothèse selon laquelle, cette littérature s’adressait à un public de grands lecteurs, les plus sensibles à ce type de littérature, les plus curieux aussi des littératures étrangères.

La 2e période de publication

Dans les années 2000, l’éditeur Zulma nous donna à lire des auteurs comme Hwang Sok-yong, Lee Seung-u, Eun Hee-kyung, Kim Yu-jeong, Lee Je-ha, mais aussi deux pansori, le Chungyang et le Byeon Gangsoé. Pendant ces années 2000, il y a eu des succès de librairie, Hwang Sok-yong, Kim Young-ha ou Lee Seung-u. Avec ces nouveaux auteurs publiés, nous entrions dans une ère nouvelle, montrant une Corée qui passait sans transition d’une époque à une autre, d’une inquiétude à une autre, d’un espoir à l’autre. Nous sortions de la dictature militaire et de la modernisation pour entrer de plain-pied dans le 3e millénaire. L’éditeur Picquier spécialisé en littérature d’Asie constitua dans ces mêmes années un fond coréen important dans lequel on peut noter des auteurs comme Kim Young-ha, Kim Won-il ou encore Gong Ji-young. Picquier dispose aujourd’hui d’un fonds d’environ 100 titres coréens. De cette vague fit aussi partie l’Atelier des cahiers en 2006, donnant à lire des textes de Corée et d’Asie de l’Est. Dans la même période l’éditeur Imago publiait des textes de pansori, et de théâtre, faisant aussi le choix d’une littérature non commerciale. Ces découvertes littéraires furent comme bien souvent l’œuvre de passionnés, des traducteurs coréens et des réviseurs français qui osèrent soumettre aux éditeurs des manuscrits traduits avec l’aide des fondations coréennes. Avec cette deuxième vague de publications, les lecteurs français pouvaient découvrir une littérature moins tributaire de l’histoire du pays, plus accessible.

La 3e période de publication

Elle intervient à partir de 2010 sous l’égide d’une maison d’édition consacrée uniquement à la littérature coréenne. Decrescenzo Editeurs introduisit ce qu’il était convenu d’appeler alors les jeunes auteurs. En 12 ans, cette maison d’édition dirigée par Franck de Crescenzo a publié 80 œuvres coréennes, constituant avec l’éditeur Picquier le plus gros catalogue d’ouvrages coréens à ce jour. En 2021 naissait une maison d’édition consacrée au polar coréen, Matin calme, mais cette maison d’édition vient de fermer ses portes. Bien entendu, il serait injuste d’oublier dans ce bref tour d’horizon, les éditeurs qui publient plus ou moins régulièrement la littérature coréenne, comme l’Asiathèque, Serge Safran, Belin, Rivages… Il y a aussi trois maisons d’édition spécialisées qui publient de la poésie coréenne, notamment les éditions Doucey, les éditions Circé et Sombre rets, qui a mis sa production en sourdine mais qui ne désespère pas de la reprendre.

Avec la création de Decrescenzo éditeurs en 2011, cet éditeur poursuivait un double but : d’une part, augmenter le nombre de romans publiés en France et d’autre part, publier ce qu’il était convenu d’appeler les jeunes auteurs. Deux ans auparavant, avait été créée la revue Keulmadang et il fallut constater combien il était difficile de faire vivre cette revue compte tenu du faible nombre de livres coréens qui se publiaient à cette époque. En 2012, année de la création de Decrescenzo éditeurs, il se publiait à peine moins de dix livres coréens.  Une maison d’édition spécialisée en littérature coréenne devait contribuer à élever le marché global de l’édition coréenne en France. Ce pari a été relevé. Mais il y a une autre raison plus importante : cet éditeur voulait publier pour la première fois une nouvelle génération de jeunes écrivains, inconnus, jamais publiés en France, mais porteurs d’une autre sensibilité, d’autres préoccupations, d’autres drames, et certains de ces écrivains ont obtenu un succès relatif en France. Kim Ae-ran, Kim Jung-hyok, Han Yoo-joo, Pyun Hye-young, Park Min-kyu, suivis d’auteurs confirmés comme Han Kang, Park Bum-shin ou Lee Seung-u.

L’enseignement de ces trois périodes ?

Incontestablement, la première vague continue de faire trace. Les auteurs publiés sont entrés au Panthéon de la littérature coréenne, et c’est avec ces auteurs que les lecteurs français ont pu découvrir l’histoire de la Corée au dernier siècle. La Corée peinte dans ces œuvres n’existe plus mais les oeuvres continuent de nous bouleverser. La deuxième vague a ouvert une voie nouvelle dans la littérature coréenne publiée en France, en donnant à lire des auteurs plus ancrés dans le réel du pays des années 2000, sortant la littérature coréenne dans une confidentialité que ses thèmes mêmes exprimaient. Quant à la troisième vague, elle fut la vague des jeunes auteurs coréens, vague qui se poursuit aujourd’hui avec certains auteurs devenus sinon célèbres en France, du moins connus.

Deux évènements ont contribué à dynamiser la publication de romans coréens : l’invitation de la Corée au Salon du livre de Paris l’un des plus grands salons du livre du monde (180 000 visiteurs).  Cette année-là, j’ai eu l’honneur d’être désigné par le Centre National du Livre coordinateur de la présence de la Corée à Paris. Trente écrivains coréens, tous genres confondus, ont contribué par leur présence à un décollage de la littérature coréenne en France. Mais comme toujours, comme ce fut le cas avec d’autres pays asiatiques invités d’honneur au salon du livre de Paris, l’événement terminé la pression retomba et les ventes aussi.

Depuis les 3 périodes de publication dont je parlais tout à l’heure, l’image de la Corée auprès du public a encore changé. Le soft-power engagé dans les années 90 commence à produire ses meilleurs effets depuis 2019 environ. Quels que soient les indicateurs que l’on prend sur les genres, K-pop, dramas, cinéma, téléphones portables et même les voitures, le succès coréen est au rendez-vous. Que les grands médias nationaux consacrent des reportages et des documentaires à la Corée montre à quel point le soft-power coréen est efficace en France.

Mais cette situation bénéficie-t-elle à la littérature ?

Le paysage éditorial français est entré dans une concentration sans précédent des très gros éditeurs, au point que c’est à Bruxelles, le cœur de la communauté européenne que se valident ou non ces concentrations. Dans une époque de resserrement du marché, les opérateurs concentrent leurs forces, tant dans la publication que dans la diffusion. Le phénomène déteint sur la librairie qui elle aussi confrontée aux difficultés structurelles du marché a tendance à se concentrer sur ce qui se vend le mieux et surtout le plus vite. On voit bien comment dans ce contexte, les langues aussi éloignées des langues romanes ou germaniques ont du mal à émerger.

Pourtant, la situation est paradoxale. Deux romans coréens parus en 2022 ont réalisé un excellent score dépassant chacun les 30 000 exemplaires en deux versions. À noter que dans les deux cas, c’est la version de poche, soit un livre très peu cher, qui s’est vendu le mieux. Deuxième remarque, l’un des deux livres portaient un titre japonais du nom d’une machine à sous, et il n’est pas du tout interdit de penser que la confusion a pu jouer quand on connaît l’attrait de la littérature japonaise en France depuis de nombreuses années. Ces deux succès de librairie cachent une situation qui en fait n’a pas beaucoup évolué, le reste de la production n’atteint pas des scores aussi importants. Cependant, l’effet soft-power joue aussi dans les grosses maisons d’édition, qui publient un titre par-ci par-là, espérant tomber sur le best-seller. Des maisons d’édition de plus petite taille tentent ainsi leur chance, ignorant sans doute que sur les 10 000 maisons d’édition en France, 19 d’entre elles seulement concentrent 80% des best-sellers. Cependant, pour les autres maisons d’édition, les ventes ne sont pas flamboyantes. La France publie chaque année environ 80 000 titres, parmi lesquels environ 12 000 titres étrangers et parmi ces titres étrangers 50 ou 60 titres coréens. Un chiffre insuffisant pour être visible sur le marché, quand on le compare aux 7500 livres anglais et aux 1500 livres japonais. Globalement, la littérature étrangère se porte de plus en plus mal en France. On estime qu’elle a l’an dernier reculé de 9%. Une situation curieuse dans un monde de plus en plus globalisé, ouvert aux échanges et aux cultures étrangères. Un succès de librairie en langue étrangère est estimé aujourd’hui à 10 000 exemplaires quand il était estimé à 30 000 exemplaires autrefois. Ce repli concerne évidemment toutes les littératures étrangères. Quels sont les arguments le plus souvent avancés : l’augmentation des droits de publication qui empêchent les maisons d’édition françaises, surtout de taille moyenne et de petite taille, d’acheter plus de droits étrangers. Les prix montent mais les ventes ne suivent pas. Autre argument, ce sont les grands lecteurs qui sont le plus ouverts aux littératures étrangères, les plus curieux envers les littératures du monde, les plus enclins à découvrir et à prendre des risques avec des auteurs qu’ils ne connaissent pas. Or le nombre de grands lecteurs diminue sans cesse[2]. La concentration sur quelques auteurs de renom comme Murakami Haruki, Harlan Coben ou Elena Ferrante, les valeurs sûres de l’édition étrangère et dont on sait peu ou prou que le lecteur ne sera pas déçu par l’auteur.  Il faut tenir compte en France du prix très élevé du livre. Le lecteur n’a pas tellement envie de se tromper avec un auteur qu’il ne connaît pas. Il aura tendance à se réfugier sur des auteurs à fort potentiel médiatique. Inévitablement le prix du livre freine aussi le désir de découvrir des auteurs inconnus ou des littératures à faible rayonnement.

III-Formes de la légitimation

Une première forme de légitimation peut s’appuyer sur les chiffres comme légitimation économique. Nous pouvons ici adopter au moins 3 critères. Premier critère le nombre de traductions 2e critère le nombre de prix obtenus 3e critère le chiffre des ventes.

Le critère de traduction

En France, le volume des traductions augmente dans une proportion mesurée. La France est un pays qui traduit beaucoup, environ 20% de sa production éditoriale. En 2023[3], les traductions de l’anglais se situaient à la première place avec 59% des traductions suivies du japonais à 18%, le chinois se situait à 0,6% Les traductions coréennes n’étaient pas mentionnées. Selon le recoupement de plusieurs sources, elles se situeraient entre 0,1 et 0,3 % des traductions. Un chiffre insuffisant pour entrer dans les statistiques officielles. En 2020, la France publiait 41 titres coréens, quand la Corée publiait 823 titres français[4]. En Corée, on traduit environ 20% de la production éditoriale : la langue anglaise représente 39% des traductions, le japonais 29% et le français 6%[5]. En France comme en Corée, la domination des langues anglaise et japonaise semble installée pour longtemps encore. Pourtant, dans ce tableau un peu sombre, la littérature coréenne semble trouver une certaine vigueur depuis les débuts de la pandémie de covid-19. Il n’y a pas encore de statistiques, mais nous observons une augmentation des traductions. Quelques maisons d’édition filiales de grands groupes tentent une bonne affaire avec un titre coréen.  

Dans son ouvrage Un désir de littérature coréenne publié en France[6], Jeong Myeong-kyo estimait à juste titre que la traduction était l’une des voix à prendre pour l’accès de la littérature coréenne à la scène mondiale, et —précisait-il, au moins dans un premier temps. Il soulignait aussi que la réception en France des œuvres de Yi Cheongjun, de Hwang Sok-yong, de Lee Seung-u, entre 1990 et 2000, avaient été de petits évènements inscrivant la littérature coréenne dans un domaine particulier influencée par l’histoire du pays et distinguant cette littérature des autres littératures d’Asie, notamment d’Extrême-Orient. À côté de ces auteurs offrant un bel échantillon de la production littéraire coréenne, Yi In-seong, poursuivant une route solitaire, pouvait compléter le panorama, ajoutant une voix singulière, inédite bouleversant autant les codes linguistiques que narratifs et annonçant en Corée, dès les années 70, une autre conception de la littérature, loin des exigences du marché. Mais les chiffres ne sont pas tout. Une traduction entre dans un circuit éditorial (depuis la primo-traduction jusqu’à la préparation de copie) qui transforme bien souvent le texte, quand ce ne sont pas les traducteurs « une traduction facile à lire », ‘pour tous publics », en quelque sorte une traduction plus proche de sa réception plutôt que de l’original.

Le critère du nombre de Prix obtenus

Du plus lointain Prix obtenu, le prix de l’Inaperçu de Shin Kyung-suk en 2009, suivi du même Prix de l’Inaperçu de Kim Ae-ran, en 2013, il fallut attendre d’abord les nominations au Man Booker Prize de Chung Bo-ra et de Cheon Myung-gwan à ce même Booker Prize, avant que Han Kang le remporte en 2016, et cette même auteure remporte le prix Médicis en 2023. Depuis que la littérature coréenne est présente en France, les années 80 approximativement, le résultat obtenu ces dernières années peut être jugé satisfaisant. Bien sûr, la Corée se désole de ne pas avoir obtenu de Prix Nobel jusqu’ici. Si la France est en tête du palmarès avec 15 prix obtenus, 21 % des prix vont aux écrivains de langue anglaise, les langues européennes trustant presque la moitié des Prix Nobel. Sur les 17 derniers Prix Nobel, 7 auteurs écrivent en langue anglaise, soit 41% des lauréats. Les premières années du millénaire profitent largement aux langues dominantes, rendant très étroite la marge de manœuvre des langues dominées. La littérature égyptienne a obtenu un prix Nobel en 1988 mais n’émerge pas pour autant comme littérature mondiale. Qui sait que Sainte-Lucie un tout petit pays des Caraïbes a obtenu un prix Nobel en 1992 ? Le classement des Prix Nobel dans le monde profite aux langues et littératures dominantes :

1erFrance16 lauréats13,3% des prix
2eUSA13 lauréats10,8% des prix
3eRoyaume-Uni11 lauréats9,17% des prix
14emeJapon2 lauréats1,67% des prix
38emeChine1 lauréat8,83% des prix

Pour anecdote, nous citerons cette IA chinoise qui vient de recevoir un Prix littéaire.

Le critère des ventes

La traduction japonaise de Kim Ji-young, né en 1982, s’est vendu à 200 000 exemplaires. En incluant les ventes dans 10 autres langues, plus de 300 000 exemplaires ont été vendus. La Végétarienne de Han Kang s’est vendu à plus de 160 000 exemplaires en 13 langues, et Amande de Son Won-pyeong, publié au Japon en 2019, s’est vendu à plus de 90 000 exemplaires. (source Lti-Korea-2023). Le nombre de demandes de subventions des éditeurs est passé de 13 en 2014 à 289 en 2023. Cet indicateur indique à lui seul combien la littérature coréenne semble avoir le vent en poupe, soutenue par le soft-power coréen. Les chiffres, c’est leur fonction, sont là pour indiquer comment se comporte le marché éditorial. Mais, évaluer une littérature, soit des oeuvres écrites à valeur esthétique, notamment quand elle se propose de devenir littérature mondiale, et affronter les littératures dominantes installées de longue date, exige la mobilisation d’autre paramètres, en particulier, les genres littéraires, l’esthétique des textes, les choix thématiques.

Trois hypothèses de reconnaissance

L’édition littéraire est entrée de plain-pied dans le libéralisme dans les années 70 introduisant ainsi une nouvelle logique économique. Mais cette logique, pour aveuglante qu’elle soit ne doit pas nous faire oublier que les critères économiques, s’ils démontrent véritablement une progression de la littérature coréenne, ne sont pas suffisants pour autant à légitimer la littérature coréenne en tant que littérature mondiale. Nous l’avons dit plus haut : les marqueurs de progression de la littérature coréenne en France sont évidents. La France publie beaucoup plus que par le passé mais encore beaucoup moins que le Japon ou les pays anglo-saxons. Si nous écartons momentanément les critères économiques que nous avons évoqués plus haut, nous proposons à titre d’hypothèses, trois pistes de réflexion.

Diversité éditoriale

Nous sommes entrés dans l’ère post-littéraire[7], où le genre romanesque est devenu hégémonique et gouverne l’espace littéraire. Le roman en France représente 25% du chiffre d’affaires des éditeurs. Aux deux rentrées littéraires de janvier et septembre sont publiés près de 1100 romans, parmi lesquels les œuvres des poids lourds mondiaux de l’édition. Mais la France publie d’autres genres, journaux intimes, extimes, littéraires, correspondance, essais, chroniques, poésie, textes philosophiques. La littérature coréenne qui parvient en France est presque exclusivement romanesque, roman court, roman long ou nouvelle. Certes, les textes poétiques et de théâtre coréens sont toujours édités, mais ils n’assurent malheureusement pas à eux seuls la visibilité d’une littérature riche de genres et d’œuvres. C’est donc une littérature réduite à un genre qui se confronte aux autres littératures sur les rayons de libraires.

Pourtant en leur temps, Sterne, Borgès, Kundera, Handke, Sebald… ont su bouleverser la structure narrative et donner des chefs-d’œuvre de diversité. Devons-nous écouter David Shields[8] — prenant acte de la mort du roman tué par la modernité, quand il appelle de tous ses vœux à une jazzification de la littérature ? c’est-à-dire à une libération des frontières, comme le fit le jazz en son temps. Borges soulignait déjà en 1957 combien il considérait l’histoire du roman comme achevée, que celui-ci ne pouvait plus que se poursuivre dans un « mauvais infini » qui est son « enfer ». Lutter sur le seul terrain romanesque revient à amputer sa littérature de son potentiel expressif. La diversité éditoriale serait de nature à rehausser l’attractivité de la littérature coréenne, si cette dernière pouvait se confronter aux autres textes qui nous parviennent, d’Europe et des Etats-Unis.Les œuvres classiques coréennes sont majoritairement absentes des traductions. Il n’y a que très peu d’auteurs de la période 1900-1960, à quelques exceptions près, les auteurs des siècles précédents ne sont pas traduits, à l’inverse des littératures chinoise et japonaise où les classiques de poésie, de religion et de fiction sont nombreux. La situation de l’édition en sciences humaines et sociales est quasiment inexistante. Comment connaître et apprécier la littérature coréenne si on ne connaît pas la pensée coréenne classique et surtout contemporaine ? Les ouvrages de philosophie, de sociologie et plus largement de sciences humaines et sociales coréennes sont souvent absents du paysage éditorial sauf pour les ouvrages sur la Corée du Nord. Ces ouvrages de sciences humaines et sociales ou de critique littéraire ne représentent pas un gros potentiel de ventes. Mais, combien ils sont nécessaires ! Certes, des ouvrages sur le bouddhisme sont publiés, des recueils de poésie grâce aux maisons d’édition spécialisées, mais la grande majorité des textes qui parviennent en France sont des textes de fiction. Nous avons la faiblesse de penser que la bonne santé d’une littérature se mesure à la diversité de ses genres.

Diversité textuelle

Prenant acte que la littérature se perd dans un processus de dévalorisation continue de sa propre histoire, William Marx, historien de la littérature, montre que la littérature est non seulement attaquée de l’extérieur[9] mais aussi de l’intérieur[10]. L’accès de la littérature coréenne à la scène mondiale ne peut s’examiner en dehors des contraintes qui pèsent sur la littérature en général et sur le monde de l’édition en particulier. Pour les raisons évoquées plus haut, le roman coréen se heurte en France aux littératures (entendues ici au sens de multiples genres) installées de longue date. Dans un contexte de resserrement de la lecture, la primeur est donnée aux valeurs du groupe dominant. C’est ce groupe qui impose ses règles, linguistiques, esthétiques, et contraint les groupes minoritaires, soit à l’imiter, soit à s’en écarter. C’est sans doute sur ce dernier point que réside la chance de la littérature coréenne traduite en France. Résister. En offrant des textes inclassables, dont la valeur littéraire est reconnue[11], des textes qui contribuent à transformer ses lecteurs. Des textes dans lesquels la langue est au coeur du projet. C’est par la langue que nous accédons à la littérature, une langue qui ne se résume pas à un agencement satisfaisant de mots, à « un joli style »; car il n’y a pas de style si l’intériorité de l’auteur ne fait pas surface, si l’écriture ne provient pas du plus profond de l’ombre et de la mort comme se plaît à l’affirmer l’un des grands « stylistes » français, Richard Millet : En fin de compte, on n’écrit que pour rendre hommage à la langue, la louer ou témoigner d’elle. Des textes importants, dont la valeur littéraire est reconnue, bien que la légitimation des œuvres de qualité devienne de plus en plus incertaine, à destination de lecteurs exigeants sont de ceux qui confèrent à une littérature un capital symbolique supérieur.

Diversité thématique

Bien entendu, il n’est pas question de définir ce qui doit être écrit, mais de s’interroger continûment sur le rôle de la littérature. Est-elle devenue un instrument de divertissement, un loisir, avec des choix thématiques toujours plus étranges, plus fantastiques, plus « grand public », auquel cas, elle se confrontera inévitablement aux industries culturelles plus aptes à répondre à cet intérêt. Ou bien, a-t-elle toujours la mission de défier le langage, pour le restituer ce qui ce qu’il peut témoigner de notre monde, de notre destin humain. Si littérature coréenne a pour objectif d’intégrer la littérature mondiale sans courir le risque de se diluer dans celle-ci, elle doit impérativement conserver sa spécificité coréenne. Notre longue pratique de la diffusion, dans les salons du livre, dans les librairies et dans les conférences montre que les lecteurs français veulent des romans qui parlent de la Corée, de son histoire, de sa culture, de sa cuisine, etc. Une littérature qui ne souffrirait pas du défaut d’attribution. Une littérature en désir de reconnaissance ne peut pas proposer des textes qui pourraient provenir de n’importe quel endroit du monde, de la main de n’importe quel auteur. Une littérature oscillant entre son désir d’accession au rang de littérature mondiale et son ancrage dans un sol, une culture, un pays, une histoire. En quelque sorte, une littérature oscillant entre Goethe pour sa littérature-monde et Herder pour sa littérature nationale.


[1] Pascale Casanova, La langue mondiale, Traduction et domination, Seuil, 2015, Paris

[2] Olivier BESSARD-BANGUY, Fin de la littérature ou crise de la lecture, in Fins de la littérature, Esthétique et discours de la fin – Tome I, pp171-182, Armand Colin, 2012, Paris

[3] Source : Syndicat Nation de l’édition, 2023

[4] idem

[5] Source : Centre du management de l’information de l’Association des éditeurs de Corée, 2014

[6] Decrescenzo éditeurs, 2015

[7] Courant de réflexion des années 90, annonçant le dépassement de la littérature par la destruction du langage et le triomphe du roman sur les autres genres et sur les textes inclassables.

[8] Écrivain américain.

[9] La haine de la littérature, Les Éditions de minuit, 2015, Paris.

[10] L’Adieu à la littérature, Les Éditions de minuit, 2005, Paris.

[11] Mircea MARGHESCOU, Le concept de littérarité, critique de la métalittérature, Kimé éditions, 2009, Paris.

(Version coréenne en fin de page)


Discussion avec le Professeur Yeo Tae-cheon (Université féminine de Dongdeok)

Sur Un avenir français à la littérature coréenne de Jean-Claude De Crescenzo

(texte pour discussion)

Bonjour Monsieur Jean-Claude De Crescenzo, Je suis ravi de faire votre connaissance. D’abord, je vous félicite sincèrement d’avoir remporté l’année dernière, en 2023, le grand Prix de traduction de la littérature coréenne (langue française) et le Prix international de Changwon KC.

En tant que critique littéraire, traducteur et éditeur, vous avez apporté votre contribution depuis une vingtaine d’années à faire connaître la littérature coréenne en France. Votre texte Un avenir français à la littérature coréenne nous montre de manière précise et sagace l’état des lieux de la littérature coréenne, constaté par un regard à la fois extérieur et intérieur. Je suis tout à fait d’accord avec votre affirmation selon laquelle pour évaluer le statut mondial de cette littérature, il faut savoir qui légitime et quels sont les critères de cette légitimation, ainsi que son processus. Votre exposé porte donc sur un thème très intéressant et constitue une tâche à résoudre pour moi qui écris des poèmes depuis toujours en Corée. À présent, je vais vous poser quelques questions selon l’ordre des sujets abordés dans votre article.

1. Dans la première partie intitulée « La littérature coréenne, une littérature dominée », vous indiquez que si sous l’effet de la K-pop, les jeunes s’intéressent de plus en plus à la langue coréenne, le nombre des adultes apprenant la langue dans un établissement comme l’école coréenne augmente aussi ; selon vous, il s’agit d’une génération qui lit des livres. C’est une bonne nouvelle. Ce sont eux qui liraient finalement la littérature coréenne, et j’aimerais savoir si ce courant est un phénomène assez répandu en France. En fait, les gros lecteurs de la littérature en Corée sont incontestablement des jeunes femmes entre vingt et quarante ans.

Une petite précision, je ne suis plus éditeur depuis 2017 même si je continue de m’intéresser à l’édition de littérature coréenne. C’est désormais Franck de Crescenzo l’éditeur. Les lectorats français et coréens se ressemblent. En effet, le lectorat est plutôt féminin, dans la tranche moyenne d’âge 30-50 ans. Le lectorat jeune est en recul permanent depuis plusieurs années. Non pas que les jeunes lisent moins, mais ils lisent moins de livres. Le constat que je fais est d’abord celui d’un universitaire. Je vois bien d’où les étudiants tirent leurs sources, rarement des ouvrages. Dans l’École coréenne que je connais le mieux, le résultat est le même. Les jeunes apprenants lisent peu, les apprenants plus âgés sont les véritables lecteurs de la littérature coréenne. Je n’ai pas ressenti chez les jeunes une influence de la k-pop sur la littérature coréenne. Les lecteurs les plus assidus des littératures étrangères sont en général de grands lecteurs (+de 20 livres par an). Mais attention, les grands lecteurs diminuent et toutes les littératures étrangères sont en recul constant en France depuis quelques années. Un indicateur : de moins en moins d’écrivains étrangers sont invités en France pour cause de mévente de leurs livres.

2. Dans la deuxième partie, « La situation de la littérature coréenne en France », vous précisez la réception de la littérature coréenne selon les différentes périodes. Ce qui m’a étonné en particulier, c’est que parmi 12 000 titres étrangers publiés chaque année en France, le coréen ne présente que 50 à 60 titres. Sans parler de 75 000 livres anglais (59%), le fait que le japonais représente environ 1 500 titres (18%) alors que le nombre des traductions coréennes n’est que de 50 à 60 (0,1-0,3%) me frappe un peu. Faudrait-il considérer que le phénomène culturel tel que l’engouement pour la K-pop n’a pas encore influencé le marché de la traduction, au sens étroit, et celui de la littérature, au sens plus large ?

Dans les littératures étrangères sont d’abord privilégiées les littératures d’Europe, les littératures anglo-saxonnes, ainsi que les littératures de langue espagnole pour l’Amérique latine et portugaise pour le Brésil. Les littératures d’Afrique sont aussi représentées. Pour les littératures d’Asie, la littérature japonaise a en France une grande antériorité. Le japonais est enseigné en France depuis 1863. Le coréen depuis les années 1950. La littérature japonaise dispose d’une notoriété mondiale avec des auteurs comme Kawabata, Oe, Tanizaki, Mishima, Murakami, sans parler d’Ishiguro. Par ailleurs, c’est aujourd’hui le manga qui tire les traductions vers le japonais. La littérature chinoise est aussi présente depuis longtemps, de même que les Études chinoises à l’université, ainsi que la littérature vietnamienne, à cause de passé colonial de la France. Sauf les littératures d’Asie du Sud-est, la littérature coréenne est la dernière arrivée. Il est normal que son installation dans le paysage littéraire demande plus de temps. De mon point de vue, la K-pop n’exerce qu’une influence mineure sur la littérature coréenne. La K-pop est un monde à part, avec ses codes, ses règles, ses idoles, son public. Il y aurait plus de proximité entre le cinéma ou la cuisine et la littérature qu’entre la littérature et la k-pop. Mais le constat est irréfutable : la littérature coréenne bénéficie de la force du soft-power coréen dont la Hallyu fait partie.

3. Dans la troisième partie « Forme de légitimation », vous proposez trois critères de légitimation : nombre de traductions, nombre de prix obtenus et chiffre des ventes. Ces trois questions ne se résolvent pas à court terme, et ce sont les éléments liés les uns aux autres, les causes et les conséquences les unes pour les autres. Cependant, selon moi, la question du nombre de traductions est primordiale. D’après vous, sur quel critère de ces trois la littérature coréenne doit-elle se concentrer le plus ?

C’est toute la question que pose le thème de ce colloque consacré à l’avenir de la littérature coréenne. Remarquons tout d’abord que la littérature coréenne tente de faire son entrée dans le concert des littératures mondiales au moment même où la littérature mondiale affronte une triple crise : crise du texte, crise de la lecture, crise de l’édition. Je n’ai hélas pas le temps de développer ce point de vue. Il est commun de dire que les périodes de crise sont aussi des périodes d’opportunités mais en attendant, quels sont les marqueurs d’une réussite possible ? Lorsqu’un titre coréen se vend bien, il peut jouer le rôle de locomotive. Cependant, les chiffres nous indiquent qu’il n’entraine pas automatiquement la vente d’un autre titre, voire d’un titre du même auteur. Les prix littéraires, y compris le Prix Nobel n’entraine pas non plus une reconnaissance de la littérature dont il est issu. Sauf si ce Prix est attribué à une littérature déjà reconnue. Certes, ça améliore les ventes des titres de l’auteur primé, mais ça n’exerce qu’une influence très limitée sur la littérature du pays. J’ai pris plusieurs exemples dans ma communication sur les littératures primées qui n’entraînent pas pour autant la littérature du pays. Les ventes ou les tarifs d’achat des droits intéressent les auteurs et les éditeurs, pas les lecteurs. C’est donc incontestablement la traduction, le vecteur le plus important. La traduction est un canal par lequel des textes sont choisis, traduits et présentés au public. C’est donc par ce canal que la littérature tout entière est perçue. C’est quasiment un champ autonome, j’oserai dire indépendant de la littérature. Il y a donc une nécessité à traduire de multiples genres littéraires. Nous avons en France, des romans, des recueils de nouvelles, des contes, des pansori, des livres de cuisine, des romans policiers, des pièces de théâtre, et quelques essais de critique sur la littérature coréenne. La question subséquente qui accompagne le volume des traductions est la suivante : quels sont les textes qui indépendamment des ventes donnent à une littérature ses lettres de noblesse ? Il faudrait tout un colloque pour répondre sans doute à cette question.

4. Encore dans la troisième partie « Forme de légitimation », concernant le deuxième critère, nombre de prix obtenus, vous évaluez : « Depuis que la littérature coréenne est présente en France, les années 80 approximativement, le résultat obtenu ces dernières années peut être jugé satisfaisant ». J’abonde dans votre sens. À présent, les œuvres de Han Kang, Kim Ae-ran, Chung Bo-ra, Cheon Myung-gwan ont le vent en poupe. Pourtant les limites de la langue dominée demeurent évidentes. Selon vous, quelle est la raison fondamentale pour laquelle la littérature coréenne ne se porte pas encore très bien en France par rapport aux littératures japonaise et chinoise ?

Je ne suis pas certain que le littérature chinoise se porte bien. Le pourcentage des traductions est en recul. Puis, je pense qu’il faut beaucoup de temps et d’efforts pour qu’une littérature fasse son chemin au milieu des littératures dominantes, la littérature anglo-saxonne notamment devenue hégémonique. En entrant dans ce champ avec la seule fiction (bien sûr, il se publie aussi des livres de cuisine, des contes, de la poésie, etc. de Corée) la littérature coréenne s’affronte aux littératures étrangères installées de longue date. J’ai l’habitude de dire qu’il ne faut pas choisir le terrain que propose l’adversaire. Autrement dit, selon moi, les littératures minoritaires ont intérêt à faire valoir leur différence plutôt qu’imiter les littératures dominantes. Une littérature traduite dépend des représentations que l’on se fait du pays qui la porte. Quelle image véhicule la Corée du Sud à l’étranger ? Rassurez-vous, c’est une image très positive, mais il faudrait une étude sérieuse pour savoir de quoi est faite cette image et voir en quoi elle serait susceptible de profiter à la littérature, notamment en France, où nous avons une vision un peu « sacralisée » de la littérature. Majoritairement, ce qu’il nous arrive en France, ce sont des romans. Certes, c’est le cas de la plupart des littératures étrangères. Cependant, elles sont, pour les littératures dominantes, aidées par le fait que des essais, des thèses, des correspondances entre écrivains, des journaux d’écrivains existent et donnent de cette littérature une image plus riche que la seule image du roman. Les exemples sont trop nombreux pour que je les cite, mais par exemple les journaux littéraires d’auteurs étrangers foisonnent en France, idem pour le nombre de thèses consacrées à des auteurs étrangers. Une littérature doit vivre de ses multiples genres. Nous avons besoin d’une vie littéraire coréenne qui ne se réduise pas à la fiction. Nous avons besoin d’un bouillonnement littéraire : approches comparatistes, rencontres d’auteurs internationaux, correspondance entre écrivains coréens et internationaux, journaux littéraires, thèses sur la littérature, nous avons besoin d’essais en sciences humaines, de pensée philosophique, autant classique que contemporaine. Bien sûr, nous sommes dans le paradoxe : ces genres ne se vendent pas beaucoup et les éditeurs français rechignent à les publier mais ils assurent une visibilité et une forme de légitimation de cette littérature. Il y a des éditeurs courageux qui, pour peu qu’ils soient aidés, sont prêts à prendre les risques. Ils l’ont prouvé par le passé, en publiant des textes pas très commerciaux.

5. Toujours dans la troisième partie « Forme de légitimation », vos « trois hypothèses de reconnaissance » méritent une grande attention de tous les agents de la littérature coréenne. Vous affirmez notamment : « Lutter sur le seul terrain romanesque revient à amputer sa littérature de son potentiel expressif ». Avec cela, vous remarquez le fait que la plupart des œuvres classiques n’ont pas été encore traduites, et soulignez également la nécessité de traduire divers ouvrages de sciences humaines et sociales. Comme je suis poète, j’aimerais aussi savoir sur l’intérêt des lecteurs français pour la poésie coréenne. Récemment, j’ai entendu dire que les contes pour enfants coréens commençaient à être appréciés dans les pays anglophones. D’après vous, quel genre hormis le roman pourrait exercer une influence sur les lecteurs ?

Oui, il se publie des contes coréens depuis quelques temps, ce type de publication remonte aux années 1990/1995 mais le premier conte a été publié dans les années 1890, en même temps que le premier texte de pansori. Plusieurs œuvres classiques ont été publiées ces dernières années. La poésie se porte mal en France, y compris la poésie française. Nos plus grands poètes contemporains vendent très peu d’exemplaires. Mes amis sont souvent éberlués d’apprendre les chiffres de ventes de recueils de poésie en Corée. Pour la poésie coréenne, il y a donc un tout petit marché, qui varie globalement de 50 à 800 exemplaires, mais plus sûrement, en moyenne, entre 100 et 300 exemplaires. J’aimerais que la poésie coréenne se développe car elle représente toutes les qualités que j’attribue à la littérature. On ne peut pas confondre cette poésie avec une autre, sans doute parce que la poésie n’existe que par l’intériorité du poète.

6. Dans la troisième partie, « Forme de légitimation », « trois hypothèses de reconnaissance », vous affirmez : « Si la littérature coréenne a pour objectif d’intégrer la littérature mondiale sans courir le risque de se diluer dans celle-ci, elle doit impérativement conserver sa spécificité coréenne. ». J’approuve votre idée. Pourtant il y a un certain décalage entre « des romans qui parlent de la Corée, de son histoire, de sa culture, de sa cuisine, etc. » que les lecteurs français veulent, comme vous le dites, et des textes « dont la valeur littéraire est reconnue, à destination de lecteurs exigeants », des textes où « l’intériorité de l’auteur » fait surface. C’est comme une distance qui existe « entre Goethe pour sa littérature-monde et Herder pour sa littérature nationale », une distance entre le désir réel de la littérature coréenne d’accéder au rang de littérature mondiale, et la littérarité à laquelle un écrivain doit tenir jusqu’au bout. Pourrait-on comprendre cela dans le sens où tout en conservant l’intériorité de l’auteur, il faudrait employer la spécificité coréenne privilégiée par le public ?

C’est une question très difficile, contre laquelle je butte constamment. On peut essayer aujourd’hui de la simplifier : quel est l’intérêt de lire une littérature étrangère, traduite donc, si c’est pour lire une littérature qui par ses thèmes ressemblent à d’autres littératures ? Autant lire des livres dans sa langue d’origine. Certes, il peut y avoir un succès à titre d’exotisme, mais finalement, le lecteur reviendra toujours vers un livre dans sa langue. La littérature coréenne des années 70-90 qui nous parvenait en France était vraiment une littérature que nous ne pouvions pas confondre avec une autre littérature. Cette littérature ne souffrait pas d’un défaut d’attribution. Mais depuis cette date, la mondialisation s’est accélérée et avec elle s’est accéléré la mondialisation des thèmes traités. Autrement dit, la littérature coréenne c’est déjà une littérature mondiale. Elle s’est mondialisée par la mondialisation de ses thèmes. Le danger, c’est qu’elle court le risque de dilution. De se voir diluée dans le concert des littératures qui traitent toutes peu ou prou de ce que j’appelle les peurs mondialisées. Je pense que les textes puissants naissent du sol, de l’histoire, de l’existence singulière d’une nation, ces textes naissent quand l’écrivain a mis sa vie en jeu dans son livre, ce que nous appelons au fond l’intériorité.

J’ai lu votre histoire sur « Les villes lentes de Corée » dans Promenade dans la littérature coréenne. Bien que le néolibéralisme nous empêche de retourner au temps de la lenteur, je suis sûr que la résolution de la communauté pourra changer la vitesse de la ville. Car seules les personnes lentes lisent, pensent et écrivent. Je vous remercie.

La vitesse est l’ennemi de la littérature. Trop de livres sont trop vite écrits, trop vite publiés, trop vite lus, trop vite oubliés. La littérature est l’œuvre du silence, du temps qui passe, de la mémoire, toutes formes qui ont besoin de lenteur pour s’exprimer. Je vous remercie pour vos passionnantes questions.

프랑스에서 바라본 한국문학의 전망

장클로드 드크레센조

한국문학번역원의 최근 통계 자료에 따르면 한국문학은 전 세계에서, 특히 일본과 앵글로색슨
국가에서 전례 없는 약진을 보이고 있습니다. 프랑스에서도 동일한 경향이 나타나지만, 매출
차원에서는 대조적인 양상을 띠는 것으로 보입니다. 하지만 한국문학의 발전이라는 주제를 다룰 때는
성장 지표를 비롯하여 한 나라의 문학을 세계문학으로 간주할 만한 평가 기준 같은 몇 가지 사항에 대한
규정이 필요합니다. 이는 만만찮은 과제로, 이때 우리는 다음과 같은 질문을 할 수밖에 없습니다. 바로
“어떤 문학을 ‘문학적’인 것으로 공인하는 주체는 누구이고, 이러한 공인 기준은 무엇인가”라는
질문입니다.
한국문학의 세계적인 위상에 대한 질문을 제기할 때는 “누가 그 위치를 결정하는가”라는 물음이
불가피합니다. 한 나라의 문학을 일군의 세계문학에 포함시키는 것을 승인하는 주체는 누구인가요?
공인 절차는 늘 공인 대상의 외부에 존재한다는 사실을 받아들인다 하더라도 이 문학을 공인하는
권한이 누구에게 있는지 묻고, 그 기준이 무엇인지도 알아야 합니다. 실제로 피지배 언어권의 문학이
지배 문학까지는 아니더라도 전통적으로 이들 문학이 주를 이루는 세계문학의 반열에 오르려면 어떻게
해야 할까요?

I. 피지배 문학으로서의 한국문학
『세계의 언어, 전통과 지배』 1 에서 파스칼 카사노바는 지배 언어에 대해 저항하는 방법은
무신론자의 입장을 취하는 것, 다시 말해 이 같은 언어의 권위를 믿지 않는 것이라고 주장합니다.
지리적으로는 가깝고 시대적으로는 멀리 떨어진 순서로 열거하자면 프랑스의 뒤 벨레, 독일의 헤르더,
이탈리아의 레오파르디, 러시아의 클레브니코프가 이미 입증한 것과 같이 지배 언어가 다른 언어에
스며든다 하더라도 그 위상은 불안정하고(한국의 ‘콩글리시’처럼), 각 언어는 저마다 미학적 표명의
가능성을 지니고 있습니다. 언어는 결코 화자 수로 위력을 행사하지 않고(그렇지 않다면 중국어나
러시아어에 비해 화자 수가 적은 프랑스어가 결코 지배어가 되지 못했을 것입니다), 모국어 화자뿐
아니라 외국인들이 부여하는 권위를 통해 지배 언어가 됩니다. 부르디외에 의하면, 언어는
권력(오늘날의 경우, 세계화된 언어 권력)의 접근성에 따라, 그리고 그것이 제공하는 상징적 이익에 따라

1 파스칼 카사노바, 『세계의 언어, 전통과 지배La langue mondiale, Tradition et domination』, 파리 : 쇠이유, 2015.

사회적으로 위계화됩니다. 한 언어는 화자가 여러 언어 사이의 위계를 신뢰할 때 지배적인 위상을
획득합니다. 한 언어의 영향력이 인정되면 그것에 상징적 이익이 부여되고, 이러한 이익은 화자뿐
아니라 제도에 의해서도 재고하기 어려워집니다(한국에서 사용되는 한자를 예로 들 수 있습니다).
물론 한국어의 위상은 변천을 거듭해왔고, 이 언어를 배우려는 젊은 층의 수요가 말 그대로 폭증하는
추세입니다. 가령 저희 엑스마르세유대학교 한국학과의 경우, 정원은 75명인데 반해 등록 희망자 수가
2,000명에 달합니다. 하지만 한국어, 더 나아가 한국문화에 대한 열광은 대개 젊은이들에게 나타나는
현상으로, 이 연령대 독자 수는 수년 전부터 현저히 감소하는 추세입니다. 2023년 프랑스도서센터에서
시행한 독서 관련 조사에 따르면 15세에서 24세 사이의 청소년 및 청년 다섯 명 중 한 명은 지난 1년 동안
책이라는 것을 아예 펴본 적이 없고, 설문 응답자의 49%는 어쩌다 한 권 읽을 정도라고 밝혔습니다.
따라서 한국어 및 한국문화를 열성적으로 배우고 즐기는 대다수는 책과는 거의 담쌓고 지내는 독자라고
볼 수 있습니다.
하지만 한국어 학습자의 또 다른 부류가 형성되고 있는데, 이는 주불 한국문화원과 프랑스 곳곳에
소재한 한글학교의 노력 덕분이기도 합니다. 이들 기관에 한국어를 배우러 오는 계층은 문화에 관심이
있거나 관광을 목적으로 하는 성인들입니다. 젊은 층에서 흔히 보이는 케이팝의 영향이 이 범주에서는
거의 나타나지 않습니다. 다행히 이들은 책을 읽는 연령층입니다. 한국어의 인기가 한국문학에 도움이
된다고 말하기는 아직 무리이지만, 학습자의 고령화는 멀리 내다볼 때 유리하게 작용할 수 있다고
판단됩니다.

II. 프랑스 내 한국문학의 상황
출판 제1기
프랑스에서 한국문학 출판의 역사는 크게 세 시기로 구분됩니다. 첫 번째 시기는 1990년대 이문열,
이청준, 박완서, 최윤, 김승옥, 최인훈, 조세희 같은 작가들의 소개와 함께 시작되었습니다. 이들의
작품은 악트 쉬드에서 첫선을 보였는데, 한국문학 발간의 선구적 역할을 담당한 출판사입니다. 덕분에
프랑스 독자들은 강렬하고도 다채로운 한국문학과 만날 수 있었지만, 작품의 진가를 알아보기 위해서는
이 나라의 역사에 대한 상당한 지식이 필요할 때가 많았습니다. 이는 물론 모든 세계문학에 해당되는
사항이나 한국의 경우, 문학과 역사의 관계가 유독 긴밀한 데다 20세기 작품은 더더욱 그렇기
때문입니다. 이들의 소설에서는 지난날의 고난과 역경을 헤치고 나와 산업화를 향해 강행군하는
과정에서 그로 인한 손실마저 감내해야 했던 한국의 아픔을 읽을 수 있습니다. 역사 관련 지식과 ‘상호
텍스트성’이라는 개념에 조금도 거부감이 없는 세대에게 이는 더없이 훌륭한 문학으로, 이들 독자는
작품의 배경을 이해하기 위해 기꺼이 독서의 지평을 넓히고자 하기 때문입니다. 제가 아는 바로는 해당
시대에 관한 조사는 이루어지지 않았지만, 이러한 문학은 고급 독자, 즉 이 같은 장르에 친숙하고
외국문학에도 호기심이 많은 독자층을 대상으로 한다고 가정할 수 있겠습니다.

출판 제2기
2000년대 들어 쥘마 출판사에서는 황석영, 이승우, 은희경, 김유정, 이제하 등의 작가들뿐 아니라
『춘향가』와 『변강쇠 타령』 같은 판소리도 소개했습니다. 당시 황석영이나 김영하, 이승우의 소설이
서점에서 인기를 끌었습니다. 새로운 저자들의 출간과 함께 신기원에 접어들면서 한 시대에서 다른
시대로, 한 고민에서 다른 고민으로, 한 희망에서 다른 희망으로 단숨에 이행하는 한국의 모습이
제시되었습니다. 군사 독재와 근대화에서 빠져나와 새로운 밀레니엄으로 곧장 진입하는
시점이었습니다. 아시아문학을 전문으로 하는 피키에는 이 무렵 김영하, 김원일, 공지영을 위시한
탄탄한 작가층을 구축했습니다. 오늘날 이 출판사는 백여 종의 단행본을 보유하고 있습니다. 2006년
아틀리에 데 카이에도 한국과 동아시아 관련 책들을 선보이면서 이 같은 대열에 합류했습니다. 같은
시기에 이마고 출판사도 판소리와 연극 대본 출간을 통해 비상업적인 문학까지 선택지를 넓혔습니다.
프랑스에서 이러한 문학을 발견할 수 있게 된 것은 대개 열정 넘치는 이들이 이루어낸 결실로, 한국인
번역가들과 원어민 감수자들이 출판사의 문을 용감하게 두드리고 한국의 기관이나 재단에서 지원을
아끼지 않았기 때문입니다. 그리하여 출판 제2기에 해당하는 이 시기에 프랑스 독자들은 역사와 다소
무관한 문학, 다시 말해 더 읽기 쉬운 문학과 만날 수 있었습니다.
출판 제3기
한국문학 출판 역사의 세 번째 시기는 2010년대 들어 어느 한국문학 전문 출판사의 주도로
찾아왔습니다. 2012년, 드크레센조 출판사는 당시 ‘젊은 작가들’이라고 불리던 이들의 작품을 선보이기
시작했습니다. 현재 프랑크 드크레센조가 이끄는 이 출판사는 12년에 걸쳐 80여 종의 한국 관련 책을
출간하면서 피키에와 더불어 오늘날 해당 분야에서 가장 두툼한 카탈로그를 보유하고 있습니다.
2021년에는 한국 추리소설을 집중적으로 소개하는 마탱 칼므(고요한 아침)가 문을 열었습니다. 그리고
프랑스 내 한국 관련 출판의 역사를 간략하게나마 되짚어보는 이 시점에서 아지아테크나 세르주
사프랑, 블랭, 리바주처럼 한국문학을 그런대로 꼬박꼬박 내놓는 출판사들도 빼놓으면 안 될 것
같습니다. 또한 한국 시를 전문으로 내는 출판사도 세 곳이 있는데, 두세와 시르세, 송브르 레가 이에
해당합니다. 송브르 레의 경우, 당분간 시 출간을 접은 듯하지만 재개할 희망을 놓지는 않은 것으로
보입니다.
창립 이래 드크레센조 출판사는 두 가지 목표를 추구해왔습니다. 하나는 프랑스에 출간되는 소설
수를 늘리는 것이고, 또 하나는 젊은 작가들의 작품을 소개하는 것이었습니다. 출판사를 열기 두 해 전,
문예지 『글마당』을 창간하면서 저희는 당시 나오는 한국 책이 얼마 안 돼 잡지 발행을 계속하기가 쉽지
않겠다고 예상했습니다. 출판사를 설립한 2012년에도 그 해에 발간된 한국 관련 책은 십여 권에
불과했습니다. 그런 이유로 한국문학 전문 출판사를 열면 단행본 시장을 넓히는 데 도움이 될 것으로
보았습니다. 저희의 예상은 맞아떨어졌습니다. 그리고 더 중요한 목적은 바로 신세대의 젊은 작가들을
최초로 소개하는 것이었습니다. 그때까지 프랑스에는 전혀 알려지지 않았지만 다른 감수성, 다른 고민,
다른 이야기를 들려줄 수 있는 작가들이 적잖았습니다. 그중 몇몇은 프랑스에 출간되면서 어느 정도

성공을 거두었는데, 김애란, 김중혁, 한유주, 편혜영, 박민규 등의 경우가 이에 해당합니다. 이후에 한강,
박범신, 이승우 같은 이미 정평이 난 작가의 소개가 뒤따랐습니다.
이 같은 한국문학 출판의 역사에서 무엇을 배워야 할까요?
물론 초창기의 흐름이 현재까지도 쭉 이어지고 있습니다. 당시 발간된 작가들은 한국문학의
‘판테온pantheon’에 입성했고, 프랑스 독자들이 20세기 한국 역사를 알게 된 것은 다 이들 덕분입니다.
이 작가들의 작품에서 묘사되는 한국의 모습은 더 이상 존재하지 않지만, 우리에게 주는 충격과 감동은
변함이 없습니다. 또한 두 번째 흐름은 프랑스 내 한국문학의 발간에 길을 터주면서 새천년의 현실에
보다 밀착된 작가들의 작품을 보여주었습니다. 다양한 주제를 통해 내밀함을 표현하는 또 다른
한국문학이 등장한 것입니다. 마지막으로 세 번째 흐름은 젊은 작가들의 물결로, 이 같은 현상은
프랑스에서 어느 정도 인지도를 쌓은 몇몇 작가들의 선전과 더불어 오늘날에도 계속되고 있습니다.
그런데 이 대목에서 한국 소설 발간에 활기를 불어넣은 두 요인을 짚어보고 가야 할 것 같습니다. 우선
파리국제도서전으로, 해마다 18만여 명이 방문하는 이 대규모 행사에 2016년 한국이 주빈국으로
지정되었습니다. 그리고 같은 해에 저 역시 과분하게도 프랑스국립도서센터에서 한국문학 담당
코디네이터로 위임을 받았습니다. 다양한 장르의 작가 30여 명이 도서전에 참석하여 한국문학 홍보에
힘을 보탰습니다. 하지만 으레 그러하듯 이전에 주빈국으로 초청받은 다른 아시아 국가들의 경우와
마찬가지로 행사가 막을 내리자 관심도 시들해지고 판매량 역시 뚝 떨어졌습니다.
앞서 말씀드린 세 시기 이후 대중에게 비치는 한국의 이미지는 또 다른 변화를 겪었습니다. 바로
위에서 언급한 도서전에 이어 두 번째 요인은 바로 한국의 ‘소프트파워’로, 90년대에 싹트기 시작한 이
영향력이 2019년쯤부터 본격적으로 발휘된 것입니다. 케이팝과 드라마, 영화, 휴대폰, 심지어
자동차까지 장르와 분야를 막론하고 ‘메이드 인 코리아’의 성공 사례가 속출하고 있습니다. 이제는
프랑스 국영 매체까지 나서서 한국 현지 취재 프로그램이나 관련 다큐멘터리를 제작하는 추세로,
이것만으로도 한국의 소프트파워가 얼마나 큰 위력을 지니는지 알 수 있습니다.
그렇다면 과연 이 상황이 문학에도 도움이 되는 걸까요?
프랑스 출판계는 대형 출판사들의 유례없는 기업 집중 단계에 돌입했습니다. 유럽공동체의 중심
도시인 브뤼셀에서 기업 결합의 승인 여부가 결정됩니다. 시장 긴축의 시기를 맞아 출판과 유통 분야
역시 같은 상황에 처해 있습니다. 이러한 현상은 시장의 구조적인 어려움에 직면한 서점가에도
파급되어 책방 또한 가장 잘 팔리고 무엇보다 가장 빨리 팔리는 품목에 치중하는 경향을 보입니다. 이
같은 맥락에서 로망스어나 게르만계 언어와 거리가 먼 언어권 책이 부상하기란 상당히 어려운 일이라고
할 수 있습니다.
그런데 간혹 이례적인 경우가 발생하기도 합니다. 2022년에 나온 한국 소설 두 권은 각각 두 종류의
판형으로 3만 부 이상 팔리는 훌륭한 성과를 거두었습니다. 두 책 모두 값이 얼마 나가지 않는 포켓판의
판매량이 더 많았습니다. 참고로, 그중 한 권은 ‘파친코’라는 제목이 붙어 있어 오래전부터 프랑스에서

일본문학이 갖는 매력을 감안해볼 때 혼동의 가능성이 없지 않습니다. 하지만 서점에서의 이 같은 성공
사례와는 상관없이 전반적인 상황은 썩 달라지지 않았고, 다른 책들은 이 같은 기록을 올리지 못하고
있습니다. 그럼에도 소프트파워의 효과 덕분인지 대형 출판사들은 베스트셀러가 나와주기를 기대하며
드문드문 단행본을 내놓습니다. 이런 와중에 중소규모 출판들까지 덩달아 모험에 뛰어드는 분위기로,
프랑스 출판사 만 곳 중 불과 19곳에서 베스트셀러의 80%가 나온다는 사실은 까맣게 잊어버린
모양입니다. 군소 출판사의 경우 당연히 매출이 신통치 않습니다. 프랑스에서는 매년 8만여 종의
단행본이 발행되는데 12,000종이 번역서이고, 그중에 한국 책은 50종에서 60종에 불과합니다. 시장에서
눈에 띄기에는 턱없이 모자란 수치로, 영어 번역서가 7,500종이고 일본어 번역서가 1,500종이라는 점과
비교해볼 때 더더욱 그렇습니다. 하지만 전반적으로 프랑스에서 외국문학은 점점 더 고전을 면치
못하는 처지인 데다 지난 해에도 9%가 감소한 것으로 기록되었습니다. 세계화가 가속되고 교류와 외국
문화에 개방적인 오늘날의 세계에서 참으로 의아한 현상이라 할 만합니다. 서점에서 번역서의 성공
기준도 3만 부에서 만 부로 대폭 낮아졌습니다. 이 같은 퇴조는 분명 모든 외국문학에 공통된 것이기는
하지만, 대체 무슨 이유에서 이러한 현상이 발생하는 걸까요? 우선 출판권료 인상을 들 수 있는데,
이렇게 되면 특히 중소규모 출판사에서 외서의 판권을 많이 사들이기가 어려워집니다. 책값은 당연히
올라가고, 판매량은 줄어들 수밖에 없습니다. 또 다른 이유로는 외국문학에 가장 열려 있다고 할 만한
고급 독자의 감소를 들 수 있습니다. 이들은 세계문학에 관심이 많고 낯선 저자를 발견하는 위험까지
감수할 만큼 열성적인 독자들로, 이 같은 애호가들의 수가 점점 줄어드는 추세입니다 2 . 따라서 무라카미
하루키나 할런 코벤, 엘레나 페란테 같은 저자들에게 몹시 편중되는 경향이 나타나는데, 출판계에서
‘보증수표’라고 부르는 이 특급 작가들이 독자를 실망시킬 일은 거의 없다고 보기 때문입니다. 한편
프랑스의 매우 높은 도서 가격도 고려하지 않을 수 없습니다. 어느 독자가 이름도 모르는 저자의 책을
덜컥 샀다가 낭패를 보고 싶겠습니까? 따라서 여러 매체에서 밀어주는 유명 작가의 책으로 손길이 가기
마련입니다. 책값 역시 낯선 저자나 파급력이 약한 언어권의 문학을 발견하고자 하는 욕구에 제동을
거는 요소가 될 수밖에 없습니다.
III. 공인 형태
공인 형태는 우선 경제적 공인처럼 수치에 의거할 수 있습니다. 여기서 우리는 최소한 세 가지 기준을
제시하고자 합니다. 첫 번째 기준은 번역서 수이고, 두 번째 기준은 문학상 수상 수이며, 세 번째 기준은
판매량입니다.

첫 번째 기준 : 번역서 수

2 올리비에 베사르 방기, 「문학의 종말인가, 독서의 위기인가Fin de la littérature ou crise de la lecture」, 『문학의
종말-종말의 미학과 담론Fins de la littératures – Esthétique et discours de la fin』, 1권, 파리 : 아르망 콜랭, 2012,
171~182쪽.

프랑스에서 출간되는 번역서의 종수는 완만한 증가를 보이고 있습니다. 프랑스는 번역서가 많이
나오는 나라로, 전체 출판물의 20%가량에 해당합니다. 2023년에는 영어 번역서가 59%로 가장 많았고,
일본어는 18%, 중국어는 0.6%를 차지했습니다. 한국어 번역서는 언급되지 않았습니다 3 . 여러 출처를
비교해볼 때, 한국어는 전체 번역서의 0.1~0.3%에 해당할 것으로 짐작됩니다. 공식 통계에 포함하기에는
충분치 않은 수치입니다. 2020년 프랑스에서는 41종의 한국어 번역서가 출간된 반면, 한국에서는
823종의 프랑스어 번역서가 발행되었습니다 4 . 한국은 번역서가 출판물의 20%가량을 차지하는데, 영어
번역서가 전체 번역서의 39%에 상당하고, 일본어는 29%, 프랑스어는 6%입니다 5 . 프랑스와 한국 두 나라
모두 영어와 일본어의 지배가 한동안 이어질 것으로 예측됩니다. 하지만 이처럼 다소 암울한 전망에도
불구하고 코비드19의 발생을 기점으로 한국문학 출간은 어느 정도 활기를 보이고 있습니다. 아직 통계
자료는 없지만 번역서 수의 증가가 확인됩니다. 몇몇 출판 그룹의 임프린트에서도 한국 단행본을
내놓으면서 도전에 나서는 모습입니다.
프랑스에서 ‘Un désir de littérature coréenne’이라는 제목으로 출간된 저서(원제 : 문학이라는 것의
욕망) 6 에서 정명교는 한국문학이 세계 무대에 입성하기 위해 가야 할 길 중 하나로 번역을 언급하고
있는데, 당연히 그렇습니다. 그의 말대로 “적어도 초창기에는” 그렇게 해야 합니다. 이 책에서 저자는
1990년에서 2000년사이 프랑스에 이청준과 황석영, 이승우가 소개된 것은 일종의 ‘사건’으로, 이를 통해
프랑스 독자는 한국문학이 한 나라의 역사에 영향을 받는 특수한 영역에 속하면서도 아시아, 특히
극동의 다른 문학들과 구별되는 문학이라는 사실을 발견하게 되었다고 강조합니다 7 . 1차 번역에서
시작하여 출판사 제출용 샘플로 완성된 번역 원고가 출판의 회로에 들어갈 때는 역자가 직접 손을
보거나 그렇지 않으면 편집부에서 다듬어서 ‘평이한 글’이나 ‘일반 독자를 위한 글’로 만드는 경우가
많습니다. 원문에 충실한 번역보다는 독자가 쉽게 이해할 수 있는 번역을 지향한다고 보면 될 것
같습니다.

두 번째 기준 : 문학상 수상 수
해외에서 한국 작품이 문학상을 수상한 사례를 가장 오래전으로 거슬러올라가면 2009년 신경숙이
‘주목받지 못한 작품 상Prix de l’Inaperçu’을 수상한 이래로, 2013년 김애란이 같은 상을 받았고, 그 이후
정보라와 천명관이 맨부커 상 후보에 올랐으며, 2016년에는 한강이 이 상을 수상하고 2023년에는
메디치(메디시스) 상까지 받는 영예를 누렸습니다. 80년대 무렵 프랑스에 한국문학이 소개된 이래로,

3 출처 : 프랑스출판조합, 2023.
4 Idem.
5 출처 : 대한출판문화협회 출판정보센터, 2024.
6 드크레센조, 2015.
7 한국문학의 탁월한 표본을 제공하는 이 같은 저자들 곁에서 독자적인 행보를 통해 문학의 파노라마를 완성한
이인성의 경우도 언급하지 않을 수 없습니다. 새롭고 독특한 목소리를 더하면서 언어학적, 서사적 코드를
전복시키고자 한 이 소설가는 이미 70년대부터 대중적인 요구와는 거리가 먼 새로운 문학의 개념을 예고했습니다.

최근 십여 년 동안의 성과는 만족스럽다고 볼 수 있습니다. 물론 한국은 애석하게도 아직까지
노벨문학상 수상자를 배출하지는 못했습니다. 15명의 작가가 수상한 프랑스가 수상자 배출국의 선두를
차지한 가운데, 21%의 수상자가 영어권 국가 출신이고, 유럽어가 노벨문학상의 절반가량을 점유하고
있습니다. 최근 17년 동안 노벨상 수상자 배출국을 살펴보면, 7명이 영어권 작가로 수상자 수의 41%에
해당합니다. 21세기 초반 몇 년은 지배 언어의 수상이 주를 이루어 피지배 언어로서는 가능성이
희박했습니다. 1988년에 이집트문학이 노벨상을 수상했지만 세계문학으로 부상하지는 못했습니다.
카리브해의 아주 작은 국가인 세인트루시아에서 1992년에 노벨상 수상자가 나왔다는 사실을 아는
사람이 어디 있습니까? 노벨상 수상은 지배 언어 및 이 같은 언어로 쓴 문학에나 도움이 될 뿐입니다.

순위 국가 수상자 수(명) 비율(%)
1 프랑스 16 13.3
2 미국 13 10.8
3 영국 11 9.17
14 일본 2 1.67
38 중국 1 8.83
표 1 : 국가별 노벨문학상 수상자 배출 수 및 비율

참고로, 최근 중국의 인공지능이 문학상을 수상한 사례도 있음을 밝혀둡니다.

세 번째 기준 : 판매량
『1982년생 김지영』의 일본어 번역서는 20만 부가 팔렸습니다. 다른 10개 언어 번역서까지 포함하면
판매량이 30만 부가 넘습니다. 한강의 『채식주의자』는 13개 언어로 번역되어 16만 부가 팔렸고,
손원평의 『아몬드』는 2019년 일본에서 출간되어 9만 부 이상의 판매량을 기록했습니다(출처 : 2023년
한국문학번역원), 해외 출판 지원 신청 수도 2014년 13건에서 2023년 289건으로 폭증했습니다. 이 같은
지표만으로도 소프트파워에 힘입어 한국문학이 얼마나 순항하고 있는지가 파악됩니다. 수치는 출판
시장의 현황을 알려주는 그 나름의 역할을 하기 때문입니다. 그러나 한 나라의 문학, 다시 말해 미학적
가치를 지닌 작품이 특히 세계문학을 지향할 때 그것을 평가하고, 오래전부터 입지를 굳힌 지배 문학에
맞서야 할 때는 다른 요인, 특히 문학 장르와 텍스트의 미학, 주제 선정 같은 요인들의 결집이
요구됩니다.

승인을 위한 세 가지 가설

이미 1970년대부터 자유주의 체제에 들어선 출판계는 새로운 경제 논리를 도입했습니다. 그러나 이
같은 경제학상의 기준을 통해 한국문학의 발전이 명백히 입증된다고 하더라도, 세계문학으로 공인받는
데는 충분치 않다는 사실을 유념해야 합니다. 물론 앞서 밝힌 것처럼 프랑스 내 한국문학의 성장 지표는
확실합니다. 하지만 이전보다 훨씬 더 확대되었다고 해도 프랑스의 출판 규모는 일본이나 앵글로색슨
국가에 한참 못 미칩니다. 따라서 위에서 언급한 경제 관련 기준은 잠시 접어두고 세 가지 방안을 가설로
제시하고자 합니다.

첫 번째 방안 : 출판의 다변화
오늘날 우리는 ‘포스트 문학의 시대 8 ’에 접어들었습니다. 소설이 패권을 장악하고 문학 공간 전반에
군림하는 상황입니다. 프랑스에서 소설은 출판사 매출의 25%를 차지합니다. 1월과 9월의 신간 출시
시즌에는 1,100여 권의 소설이 쏟아져 나오는데, 세계적으로 명성이 높은 작가들의 작품도 포함됩니다.
문인들의 일기나 서간집, 시, 수필, 시평, 철학 에세이 같은 다른 장르도 당연히 나옵니다. 그런데
프랑스에 소개되는 한국문학은 거의 다 소설로, 장편 아니면 중, 단편집입니다. 시와 희곡도 출간되기는
하지만, 그것만으로 다양한 장르와 풍부한 작품을 갖춘 문학이라는 인상을 주기에는 부족합니다.
따라서 서점에서 다른 나라의 문학과 겨룰 만한 장르, 즉 소설에 국한된 문학으로 보입니다.
하지만 로렌스 스턴이나 호르헤 루이스 보르헤스, 밀란 쿤데라, 페터 한트케, 빈프리트 게오르크
제발트 같은 작가들은 당대의 서술 구조에 격변을 일으키면서 다층적 해석을 가능케 하는 걸작을
내놓았습니다. 근대성에 의한 문학의 죽음을 언급하면서 문학의 ‘재즈화jazzification’, 다시 말해 당시
재즈가 그러했던 것처럼 국경으로부터의 해방을 열렬히 호소한 데이비드 실즈 9 의 말에 귀 기울여야
할까요? 소설이라는 영토에서만 싸운다는 말은 문학이 지닌 표현의 잠재성을 박탈한다는 말이나
마찬가지입니다. 출판의 다변화는 한국문학이 유럽과 미국에서 나오는 다른 텍스트와 맞설 수 있도록
그 매력을 강화하는 데 있습니다. 한국 고전문학 작품은 거의 번역되지 않았습니다. 1900년에서 1960년
사이의 작가들도 지극히 일부만 번역되었는데, 시나 소설, 종교적 성격의 글이 다수 소개된
중국문학이나 일본문학과는 사정이 달라도 한참 다릅니다. 인문과학 및 사회과학 관련 출판은
전무하다시피 합니다. 한국의 전통사상과 현대사상도 모르는데 어떻게 한국문학을 제대로 알고 감상할
수 있겠습니까? 철학 및 사회학, 더 나아가 인문, 사회과학 저서 역시 북한에 대한 저작 외에는 보기
드뭅니다. 이 같은 인문, 사회과학 저서나 문학비평집은 판매 가능성이 높지 않습니다. 그러나 그
필요성은 아무리 강조해도 지나치지 않습니다. 물론 불교 관련 저서가 나오고 전문 출판사에서 시집을
내놓기도 하지만, 프랑스에서 볼 수 있는 대부분의 한국 책은 소설입니다. 하지만 문학의 번영은 장르의
다양성으로 가늠된다고 여기는 경향이 있습니다.
8 90년대를 풍미한 사조로, 언어의 파괴와 다른 장르 및 분류 불가능한 텍스트에 대한 소설의 승리를 통한 문학의
부정, 자기 초월을 예고한 경향.
9 미국의 작가(1956~),

두 번째 방안 : 텍스트의 다변화
프랑스의 문학사가 윌리암 막스는 문학이 그 자신의 역사 속에서 지속적으로 평가절하되는 과정을
겪으면서 외부 10 뿐 아니라 내부 11 에서도 공격을 받는다고 역설합니다. 한국문학의 세계화는
보편적으로는 문학에, 특수하게는 출판에 가해지는 제약을 배제하고는 고찰할 수가 없습니다. 위에서
언급한 이유로 프랑스에서 한국 소설은 오래전부터 입지를 다진 여러 장르의 문학과 맞서야만 하는
처지입니다. 그런데 독서에 들이는 시간과 노력이 한정된 만큼, 최초의 선택은 대개 지배 집단의 가치를
따라가기 마련입니다. 지배 집단은 그 자신의 언어학적, 미학적 규칙을 부과하고 소수 집단으로 하여금
부득이하게 저들을 모방하게 하거나 아니면 떨어져 나가게 만듭니다. 프랑스에 번역되는 한국문학의
운명도 이 같은 관점에서 내다볼 수 있습니다. 그렇기에 버텨야 합니다. 그 어떤 범주로도 분류
불가능한 독창적인 텍스트, 문학적 가치가 인정되는 텍스트 12 , 독자를 바꾸어 놓을 만한 텍스트를
내놓으면서 끝까지 버텨야 합니다. 이는 바로 작품의 중심에 언어가 존재하는 텍스트입니다. 우리가
문학에 다다르는 것은 언어를 통해서고, 이때의 언어는 단어의 보기 좋은 배열, ‘그럴 듯한 문체’로
요약되지 않습니다. 작가의 내면성이 수면에 떠오르지 않는다면, 그리고 리샤르 미예가 즐겨 말하듯
“그림자와 죽음의 심연에서” 글쓰기가 솟아오르지 않는다면 문체도 존재하지 않습니다. “결국 우리가
글을 쓰는 것은 언어에 경의를 표하고 언어를 예찬하거나 증언하기 위해서”입니다. 문학사에 한 획을
긋는 텍스트, 양질의 작품에 대한 공인이 점점 더 어려워진다고 하더라도 문학적 가치가 확고한 텍스트,
까다로운 독자를 위한 텍스트, 이 같은 글들이야말로 어떤 문학에 상위의 상징 자본을 부여하는
텍스트라고 할 수 있습니다.

세 번째 방안 : 주제의 다변화
무엇을 써야 하는지를 정의하기보다는 문학의 역할에 대해 묻고 또 물어야 합니다. 마냥 생소하고
환상적이면서 ‘대중적’인 주제를 선택함으로써 기분 전환의 수단이나 취미 활동으로 전락한 문학은 이
같은 목적에 더욱 부합하는 문화산업과 맞붙을 수밖에 없는 처지가 되었을까요? 아니면 언어를
실험하는 사명을 저버리지 않고 언어 고유의 증언, 바로 세계와 인간의 운명에 대한 증언을 다시
떠맡아야만 하는 걸까요? 한국문학이 세계문학의 대열에 합류하면서도 정체성을 잃지 않는 것을 목표로
한다면 반드시 한국적인 특수성을 간직해야 합니다. 도서전 부스 운영과 서점 홍보 활동, 강연을
오랫동안 해온 제 경험으로 미루어볼 때, 프랑스 독자들이 원하는 것은 한국과 이 나라의 역사, 문화,
요리 등을 이야기하는 소설입니다. 한 나라의 문학이 국제적으로 인정받기 원한다면 세계 어디서나,
10 『문학을 향한 증오La haine de la littérature』, 파리 : 미뉘, 2015.
11 『문학에 건네는 작별인사L’Adieu à la littérature』, 파리, 미뉘, 2005.
12 미르치아 마르게스쿠, 『문학성이라는 개념, 메타문학 비평Le concept de littérarité, critique de métalittérature』,
파리 : 키메, 2009.

어느 저자한테서나 나올 수 있는 글을 내놓아서는 안 됩니다. 지금 우리가 목도하는 것은 세계문학의
위상을 획득하고자 하는 열망과, 특정한 토양과 문화, 국가와 역사에 깊이 뿌리내리려는 성향 사이에서
흔들리는 어떤 문학입니다. 이 문학이 세계문학을 지향한 괴테와 자국의


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